Vous connaissez surement ce vieux bâtiment à la base du Versant Nord, autrefois nommé le Foyer du Skieur ou Devil’s River Lodge. Ce bâtiment qui autrefois marquait la base Nord est depuis devenue une relique d’une ancienne époque. Aujourd’hui, cette bâtisse abandonnée présente malheureusement une plaie pour les yeux.

Au cours des années, plusieurs tentatives de changement de vocation ont été évaluées et entrepris, mais aucune d’entre elles n’a porté fruit. Isolée et à l’écart des activités pendant plus de 6 mois par année, sa situation géographique ne lui a jamais conféré un rôle de premier plan dans les activités estivales de la station. De plus, comme l’édifice a été rénové auparavant selon les anciennes normes, le rénover présentement serait très complexe. Le bâtiment est devenu désuet au fil du temps, en raison de l’usure et des dommages causés par des éléments naturelles.

Démolir un tel édifice est une décision difficile à prendre, mais c’est le bon choix lorsque la situation le justifie. Station Mont Tremblant a donc décidé de démanteler le bâtiment. Le permis issu de la part de la Ville de Mont Tremblant a été accordé en bonne et due forme et le processus se fera au courant de l’été 2023.

Le retrait du bâtiment permettra de mieux répondre aux besoins des visiteurs et l’espace sera éventuellement revalorisé.

Souvenirs

Afin de souligner les nombreuses vies de ce bâtiment, voici quelques faits saillants pour la postérité.

Tout débute en 1947, lorsque le gouvernement Duplessis autorise Joseph Bondurant Ryan à développer le versant nord du mont Tremblant. Avec la construction d’une route de 14km entre la rivière du Diable et les flancs escarpés de la montagne, les skieurs peuvent prolonger leur saison de ski en dévalant le versant nord où la neige y est abondante et fond plus tard au printemps.

En décembre 1947, Mary et Joe Ryan inaugurent le Versant Nord avec cinq pistes : la Devil’s River, la Lowell Thomas, la Andy Moe & Axel*, l’Inferno (la piste Expo aujourd’hui) et la Sissy Schuss. Un télésiège simple est en place pour amener les skieurs à la mi-montagne et deux câbles, préalablement installés en 1945 (Rope Tows), transportent les skieurs jusqu’au sommet. C’est au même moment que l’on célèbre l’ouverture officielle de l’auberge le Devil’s River Lodge.

*Axel était le chien de Andy et lui suivait partout lors de la coupe des pistes au Versant Nord.

Le Devil’s River Lodge a connu de nombreuses belles années sous la direction de la famille Duncan. Charlie Duncan, qui a été un des joueurs importants dans l’histoire de Tremblant, a tracé un bon nombre de pistes, en plus d’être le gérant de l’auberge. Son fils Peter a grandi dans ce lodge et est devenu l’un des meilleurs skieurs du Canada dans les années 1960, remportant diverses épreuves sur la scène internationale. Il a notamment pris part aux Jeux olympiques d’Innsbruck, en 1964, et à ceux de Grenoble, en 1968. Selon Peter, « Le ski, ce n’est pas un sport, mais plutôt une façon de vivre. […] Je ne me souviens pas à quel âge on m’a mis sur des skis pour la première fois, nous qui demeurions au pied des pistes sur le versant nord, soit au Devil’s River Lodge, administré par mes parents. J’aime bien dire que je suis né au paradis et que j’ai grandi à Disneyland ![1] »

Dans les années qui ont suivi, les familles Larue, Houle et Charbonneau ont été gardiens des lieux et témoins d’une myriade d’évènements.

Sous la gouverne du Père Marcel de la Sablonnière, le bâtiment a pris le nom du Foyer du skieur. Cofondateur du Club de ski de l’Immaculée-Conception[2] en 1951, le Père Marcel de la Sablonnière a ouvert l’Auberge du P’tit-Bonheur au Lac Quenouilles en 1962. Entre 1971 et 1991, il se dirigea au versant nord du Mont-Tremblant pour y opérer le Foyer du skieur. Dans ces mêmes années, il devint le vice-président de l’Association olympique canadienne et il fut nommé chef de mission aux Olympiques de Lake Placid en 1980.

© Archives Nationales du Québec / Auteur: Henri Rémillard Référence: Archives nationales du Québec (Montréal).

Lors de l’arrivée d’Intrawest en 1991, le bâtiment a été remis en service pour les employées des télésièges, des services de boutique de ski et réparation ainsi que les employées de la Fourchette du Diable comme salle commune avec casiers.

Avec le temps, le Foyer du skieur a perdu son charme et son utilité et est devenu un bâtiment désuet.

Un chapitre de l’histoire de Tremblant se termine peut-être, mais l’avenir nous réserve de beaux projets!

 

[1] Peter Duncan a toujours le ski dans la peau | JDM (journaldemontreal.com)

[2] Père Marcel de la Sablonnière* – Musée du ski des Laurentides (museeduski.com)